Héroïsme moderne
J’avais honte mes frères. Chacun de vos regards me transperçait, comme si je devais m’acquitter d’une quelconque peine pour cette erreur. Et pourtant, je n’y étais pour rien, je pouvais vous le jurer !
Dans la journée, l’inébranlable Jokirby s’était -une fois de plus- proposé pour partir à la recherche d’un plan de construction sur une maison proche. Pour sécuriser davantage le secteur et lui permettre de fouiller plus intensément la bâtisse pendant la nuit, je marchais dans les dunes une bonne heure durant. Ce campement était une priorité du jour.
J’effectuais trois heures de prospection pour lui trouver la planque idéale. Peu à peu, la fatigue annihila mes sens. Je décidai alors d’avaler la petite pilule rouge. Précisément celle que vous m'aviez défendu de prendre. Un souffle nouveau s’empara de mon corps et une gentille demoiselle répondant au nom de Klik apparut.
Sa compagnie lors de l’élaboration de la barricade était la bienvenue. Nous riions, bavardions sous l’œil stupéfait de Jokirby. Son avis, bien qu’avisé, nous importait peu. Le soir venu, nous prîmes congé et rentrâmes en ville, semant une soudaine bonne humeur partout où nous passions.
Cloitrée dans mon habitation, je commençai à me lasser de cette inopportune visite. Patiemment j’attendis que les effets se dissipent, mais ça ne passa pas. Pire encore, Klik avait jugé bon d’inviter ses amis ! Mon esprit était devenu le terrain de jeu d’une dizaine de personnes toutes plus bruyantes les unes que les autres. Je décidai d’aller me coucher, prise d’un mal de crâne sans précédent.
Mais ils n’étaient pas de cet avis. J’entendais des voix qui m’intimaient de me lever, de le sauver et à bout de force, je cédai à leurs pressions. Bien qu’éreintée par ma dure journée, je me sentis pousser des ailes. La demoiselle s’était emparée de mon corps, je n’étais plus qu’une simple présence reléguée au second plan de mon esprit. La panique m’envahit lentement alors que mon corps s’enfonçait dans l’immensité de l’Outre-Monde. Je compris alors que j’étais incapable de retrouver le contrôle de moi-même. Je me résignais. Une larme perla sur ma joue lorsque, après plusieurs coups de pied astucieusement placés, je fis sauter la barricade du campeur et que, d’une main sûre, je l’attirai à moi.
[…]
Quelle fut leur surprise lorsqu’au moment de fermer la porte, mes amis encapuchonnés me virent revenir avec Jokirby sur l'épaule ! Les insultes fusèrent, évidemment, mais je n’y pouvais rien. La clique qui squattait dans ma tête était hilare, visiblement satisfaite de son petit effet. Les larmes coulèrent abondamment. Je les haïssais, eux et la pilule rouge. Pas de plan pour demain.
Putain de Miss’ Klik !